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Chef à interner

vendredi 16 décembre 2005, par Yerno

Voici une parfaite illustration des effets de la drogue dure sur toute une équipe de scénaristes d’une série à grand succès.

C’est vrai - et je commence déjà cette critique par une concession, c’est dire si je suis de bonne foi (en fait il n’y a strictement aucun lien de cause à effet, pardonnez-moi) - on a déjà eu pire niveau surréalisme que cet épisode (je pense à un certain épisode avec un hélicoptère tombant d’un toit d’un hôpital... je sais, ça devient lassant de me lire rabâcher ça à chaque critique, mais vous le voyez, je ne m’en suis toujours pas remis). D’ailleurs, globalement, l’épisode est plutôt juste.

Mais Morris est chef des internes.

Et ça, ça fout en l’air la réputation de série « réaliste » qu’avait Urgences.

Morris chef des internes

Ok, c’est vrai, je ne bosse pas dans le milieu médical, et quand j’y réfléchis, je me dis que oui, il doit souvent y avoir des boulets qui occupent des postes à responsabilités. Sauf qu’il s’agit de Morris. Si ce n’était qu’un boulet à la mentalité et au comportement discutables, passerait encore... Je veux dire, ça fait longtemps qu’on sait qu’on n’a pas besoin d’être intelligent pour diriger un certain groupe de personnes, il suffit pour ça d’avoir une mentalité de leader. Ca, Morris, je ne doute pas qu’il l’ait, son arrogance à partir du moment où il a appris qu’il avait le poste le prouve d’ailleurs.

Le problème, c’est que Morris est un médecin irresponsable, et je pensais idéalement que dans la médecine, on ne mettait pas des gens dangereux à la première place. Une pensée pour Romano me traverse l’esprit à ce moment : voilà quelqu’un qui s’est montré détestable, avec tous les défauts du monde, depuis le début de la série (même si dans ses dernières saisons il montrait qu’il avait un peu de cœur... oui, draguer Lizzie dans la saison 4 n’était pas pour moi une preuve de cœur). Mais Robert Romano était un grand chirurgien, habile de ses mains, conscient de son propre talent, mais suffisamment « modeste » pour ne pas faire l’imbécile et risquer la vie d’un patient. Parce que sous ses airs de médecin froid, dédaigneux, obsédé par sa carrière, Romano prenait garde à la vie de ses patients. Que ce soit dans le souci de sa réputation ou par réel intérêt, la question ne se pose même pas dans ce contexte. Le fait est qu’un patient opéré par Romano avait en général de bonnes chances de s’en sortir.

Morris est stupide, arrogant, mais en plus dangereux. D’accord, il ne s’apprête pas à diriger le service de chirurgie, mais le fait est que je trouve ça un brin surréaliste qu’il soit nommé chef des internes... A croire qu’on cherche vraiment à montrer que n’importe qui peut obtenir un tel poste, du moment qu’il n’y a personne d’autre pour le prendre (allez-y, éliminez vos concurrents). Parce que, vous m’excuserez, mais ce ne sont pas les petites performances de Morris de ces derniers épisodes sur ses supers exposés et tout le reste qui vont me convaincre qu’il a sa place en tant que chef des internes.

Ce qui me rassure, en revanche, c’est que le reste du staff semble partager mon opinion (genre...). Tout le monde est atterré par la nouvelle, Morris se fait bouler *rires AB Productions* alors qu’il veut organiser sa petite soirée pour fêter ça, il devient insupportable, bref, la routine.

Je sais pas où on veut nous emmener, mais là je suis très, très perplexe... La série s’était améliorée, au risque de me répéter, faudrait pas que ça retourne au n’importe quoi.

L’argent gouverne le monde

Episode décidément très « administratif » puisqu’en plus du tout récent poste de Morris, nous avons droit à une lutte farouche de Susan contre l’administration inhospitalière *rires AB Productions* du Cook County.

On sait en effet depuis l’épisode précédent combien Susan tient à sa nomination (d’ailleurs, petite critique sur le manque de clarté à ce sujet... on nous parle de nomination depuis deux épisodes sans nous préciser concrètement de quoi il s’agit, à part une vague mention du statut de maître de conférences de Carter... ou alors j’avais la tête ailleurs et j’ai manqué des éléments, mais je pensais tout de même avoir été très attentif). Mais c’est Carter qui l’aura finalement, on devine surtout grâce à son gros chèque pour la construction du centre Joshua Carter.

Je ne vais pas jouer les Carterophobes, il est vrai qu’a priori Carter a tout d’un grand, ses publications sont de bonne facture, Susan le concède elle-même. Mais Susan fait aussi mention de la lassitude grandissante de Carter au fil des épisodes. Le fait est qu’il semble être ailleurs, ou du moins vouloir être ailleurs. Et c’est amusant, j’ai cru lire un message de la part de l’équipe dans ce joli petit discours : le fait est qu’on nous montre de moins en moins Carter aux urgences. Quand le « doyen » de la série apparaît, c’est plus souvent pour ses histoires à l’eau de rose que pour prendre en charge un patient (oui, je me souviens de l’épisode précédent, merci, je fais simplement un constat en me basant sur la comparaison avec les saisons précédentes). On a la sensation que Carter arrivé au bout de son « chemin professionnel », on ne trouvait plus rien à lui faire faire.

Je considère Carter comme étant plus ou moins le fil rouge de la série, en ce sens où on a suivi son évolution au fil des années, on l’a découvert externe et il est à présent titulaire. Du coup, oui, il est compréhensible que nos petits scénaristes se sentent perdus : avant, Carter avait toujours une nouvelle étape qui l’attendait, que ce soit un changement de spécialité, le fait de prendre en charge une externe (Lucy, tu me manques), le fait de viser le poste de chef des internes, etc. Mais voilà, aujourd’hui Carter est titulaire, et j’ai un peu l’impression que ce statut de maître de conférences sort de nulle part (le fait est qu’on ne l’a pas vraiment vu venir, on n’a pas amené Carter à désirer ce statut) histoire de montrer qu’il y a toujours une évolution dans la carrière de ce « fil rouge ». Sauf que quand c’est bouclé bâclé en deux épisodes, ça passe beaucoup moins bien que sa volonté de devenir urgentiste il y a bientôt dix ans (oui, soyons fous, allongeons les dates pour les rendre plus « chocs »).

En tout cas, Susan est déçue, Susan est en colère, Susan est belle (mais ça n’a pas grand-chose à voir). Jolie scène avec Kerry dans le bureau de cette dernière. Toujours amusant de constater comme les relations avec Kerry Weaver sont toujours en dents de scie. Je considère que Kerry a deux personnes aux urgences qu’elle peut presque considérer comme des amies : Abby et Susan. Mais dès qu’on entre sur le terrain professionnel, des conflits refont surface, comme l’année dernière avec Abby, et comme dans cet épisode avec Susan. Jolie scène, donc, mais je suis déjà presque sûr qu’on n’aura pas de suite, et que dans deux trois épisodes on les verra partager un moment d’émotion autour de Cosmo et Henry... c’est un peu bizarre, mais il faut bien s’habituer à un tel traitement vu que le personnage de Kerry n’est plus du tout suivi.

J’ai également apprécié la petite scène de fin entre Susan et Chuck. Voilà, je ne vais pas développer vu que j’en ai déjà parlé dans ma dernière critique, mais ce petit couple me plaît bien beaucoup.

Côté patients

Pas grand-chose à se mettre sous la dent. Je crois que la principale faiblesse de cet épisode réside dans le fait que trop d’histoires sont traitées à la fois, du coup, aucune ne ressort vraiment. Réflexion faite, je ne sais pas si c’est une véritable faiblesse, mais disons que ça empêche toute émotion de ressortir également. On regarde l’épisode avec une certaine indifférence.

Susan se fait couper le doigt en fouillant dans une patiente, c’est du déjà vu, c’est sans grand intérêt, c’est histoire de remplir du temps d’antenne.

On se sent en revanche tout de même assez touché par l’histoire d’Eugène, mais vu le sujet sensible, ça ne pouvait que nous émouvoir un brin. Un brin parce que c’est par tellement petites touches que ça en devient presque insignifiant. Je ne sais pas ce qu’on a voulu nous montrer dans la dernière scène, où Ray ne va finalement pas à son concert pour rester avec Eugène. Qu’il s’en veut d’avoir mal traité son patient, qu’il cherche à se « racheter » en quelque sorte ? Qu’il a mûri, que ses patients passent désormais en premier dans sa vie ? Bon, pourquoi pas, mais étant donné que le personnage de Ray me laisse d’une indifférence abyssale, je m’en fiche un peu qu’il ait mûri ou non... Ce type, je le déteste même pas, je m’en contrefous. Il pourrait se marier, mourir dans d’atroces souffrances, je crois que je ne ressentirais rien pour lui. On a tellement voulu le rendre « exceptionnel » en en faisant un médecin rockeur ultra caricatural qu’il n’en a aucune personnalité, ce qui fait qu’on ne peut pas s’attacher à lui.

Je généralise, je connais des gens qui se sont attachés à Ray, mais moi, non, je peux pas.

Il y a également le cas de cette gamine de douze ans qui a foutu le feu à son immeuble pour attirer l’attention de sa mère. Je ne sais pas si c’est moi qui suis blasé ou si j’ai l’impression qu’on ne nous ressort que du déjà vu, mais vraiment, même chose que pour les autres, j’ai suivi ça avec indifférence. Je ne me suis pas particulièrement ennuyé, mais je n’ai vraiment rien ressenti en voyant cet épisode. D’un autre côté, je vais me montrer aussi indulgent que possible. Au bout de onze ans, il est normal qu’une série commence à se répéter. Et la saison a montré quelques cas uniques également.

Enfin voilà, rien. Le néant.

En vrac

- Abby et Jake... bon, c’est mignon, ça ne casse pas de briques, mais ça ne prend pas non plus deux heures de l’épisode. Voilà, c’était marrant à suivre... Faudrait pas que ça se renouvelle trop souvent, cela dit, sinon le couple va vite devenir chiant à mourir. Mais comme je suis attaché aux deux personnages je suis beaucoup plus tolérant qu’envers...
- ...Sam et Luka, qui décidément n’ont vraiment rien d’intéressant à donner. Ca doit être compulsif cette volonté de les mettre au premier rang alors que je n’ai jamais vu un couple aussi insipide. Leurs histoires soi-disant si compliquées sont d’une telle superficialité qu’il n’y a pas moyen de s’identifier à eux, ni de se sentir touchés par ce qui leur arrive. Ils m’ennuient, mon dieu qu’ils m’ennuient...
- Jerrybear99... ! Heureusement qu’il est là, notre Jerry !
- Je comprends pas où on veut en venir avec Pratt et ses potes pas tous super fréquentables... Il est devenu grand maintenant, il a une vie plus structurée et ça lui viendrait pas à l’esprit d’amener un flingue pour tirer dans les réverbères ? Non, vraiment, je ne comprends pas... Oh, j’y suis, c’était pour montrer que lui, il avait une vraie raison de louper la super fête de Morris !
- Elle servait à quoi la scène finale ? A montrer que Carter pense encore à Kem ? Non parce que la conversation téléphonique... « Salut ! Ca va ? Il fait beau chez toi ? », sur fond de musique pseudo émouvante, c’était vraiment censé nous faire avoir la larme à l’œil ?
- Même pas de citation du jour, je joue mon rebelle et bouleverse la structure de mes critiques... non, en fait, y’a rien de particulier qui m’a sauté à l’oreille.


Un épisode tout juste « sympa », alors qu’il n’en reste plus que deux avant la fin de la saison, ça fait mal. Il serait temps de sortir la série de sa léthargie avant qu’elle n’y soit définitivement plongée.