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4.23 - Demons

Souvenirs souvenirs...

samedi 1er octobre 2005, par Sygbab

Quand on dit que parfois cela fait mal de se rappeler de certaines choses, on ne s’imagine même pas à quel point cela est vrai.

Dans les saisons précédentes, les épisodes situés avant le final se contentaient de n’être que des loners et ne cherchaient pas spécialement à avoir une approche particulière de ce qui allait se passer dans le dernier épisode. Cette saison 4 est différente de ce point de vue, car Zero Sum, Elegy et Demons (l’épisode dont je parle dans cette review) ne sont pas si loners que ça. Zero Sum voyait Skinner travailler pour l’Homme à la Cigarette en espérant trouver une cure pour Scully, puis Elegy revenait sur le cancer qui ronge cette dernière en se concentrant avant tout sur ce qu’elle ressent par rapport à cette situation. Tout cela aidait à rappeler (et de belle manière avec des épisodes réussis) que le cancer de Scully est au centre des évènements de cette saison, directement lié à la mythologie. Ici, R.W. Goodwin revient sur ce qui fait le fondement de la série : la quête de vérité de Mulder à propos de l’enlèvement de sa soeur. Mais sous un angle différent - ce qui n’empêche pas d’avoir une révélation (ou plutôt une confirmation) plus tard dans l’épisode, enfin presque.

Pourtant, l’épisode commence par des flashbacks de Mulder (grand, et non petit) avec Samantha qui sont dans leur chambre pendant que leurs parents se disputent violemment au rez-de-chaussée. Le téléspectateur est directement plongé dans le bain, et il sait tout de suite de quoi l’épisode va parler. Mais tout de suite après, une scène dans le présent voir Mulder se réveiller dans une chambre inconnue, avec du sang sur sa chemise, ce qui contribue à déstabiliser complètement le téléspectateur, qui ne sait plus trop maintenant quoi penser. En fait, le but est de nous placer dans la même situation que Mulder, c’est-à-dire dans l’incompréhension totale, pour nous permettre de savoir de quoi il en découle en même temps que les personnages. Car il y a un mystère à résoudre : Mulder a disparu depuis deux jours, a du sang sur sa chemise, a les clés d’une voiture appartenant à Amy Cassandra, et il manque deux balles dans son revolver.

L’insistance de Mulder à enquêter pour reconstituer les évènements va le mener directement à une maison dans laquelle il se rappelle être déjà allé... quelques jours plus tôt, mais il ne s’en souvient pas dans les détails, c’est juste une impression. Là, il découvre les corps d’Amy de David Cassandra, dont les blessures correspondent aux deux balles manquantes dans son arme. Il appelle donc les autorités locales en compagnie de Scully, ce qui le dirige tout droit en prison puisque tous les éléments le désignent comme le coupable incontestable. Bien évidemment, que ce soit Scully ou le téléspectateur, personne ne croit un seul instant que cela puisse être le cas et qu’il y a bien une explication rationnelle à tout ça... ou irrationnelle, parce qu’on sait quelle série on regarde. Et bien heureusement, Mulder ne reste pas beaucoup en prison puisque sa partenaire se trouve assez rapidement en possession de preuves médicales tendant à montrer qu’il était sous l’influence d’une drogue nommée Katémine (je vous épargnerais les précisions scientifiques), ce qui expliquerait ses pertes de mémoire (mais ça ne résout pas le mystère pour autant). Tant mieux, au moins on ne nous prend pas pour des abrutis en nous faisant mariner.

Lorsqu’un gardien de la prison se suicide et que Scully remarque qu’il possède la même marque au niveau du bord du cuir chevelu qu’elle a trouvé sur les deux cadavres, cela lui permet d’établir un lien entre les "victimes". Je vais reparler de cela tout de suite, mais j’aimerais m’attarder deux minutes sur ce fameux gardien. Le moment où il se tire une balle ne correspond pas à sa première apparition dans l’épisode. En effet, après que Scully ait rejoint Mulder dans le motel où il s’est réveillé, une scène le voit découper son visage sur des photos, tout en saignant du front. Forcément, à ce moment-là, le téléspectateur s’oriente sur cette piste, et en profite pour gueuler un peu parce que c’est nawak de montrer le visage du coupable dès le début. Goodwin se détourne habilement de cela puisqu’en fait cet homme suivait - tout comme Amy et David Cassandra - un traitement agressif pour recouvrer ses souvenirs, administré par un certain Dr Charles Goldstein. Sa technique est d’envoyer des impulsions électriques directement dans le cerveau, ce qui pour Scully est la cause du comportement auto-destructeur de ceux qui subissent ce traitement. Son hypothèse sera confirmée lorsque les analyses de la chemise de Mulder prouveront que les taches de sang ne correspondent pas à l’impact des balles, ce qui indique que ce sont des suicides. Le deuxième élément intéressant, c’est que si ces personnes chassaient leurs souvenirs, c’est parce qu’elles se disaient enlevées par des extraterrestres. Sachant que de plus les évènements se déroulent non loin de la résidence secondaire des parents de Mulder, on comprend tout de suite mieux ce qui l’a conduit droit dans le Rhode Island. Et c’est tant mieux s’il ne se souvienne de rien, parce que le fait d’avoir assisté à deux suicides consécutifs de deux personnages âgées (ou peut-être que l’un d’entre eux a tué l’autre avant de s’envoyer en l’air - enfin de se finir - je veux dire se tuer) aurait pu le traumatiser vu qu’il n’a rien pu faire.

Le mystère est donc résolu dans la première partie de l’épisode, que raconter dans la deuxième ? Eh bien puisque le sujet est lancé, Goodwin se concentre sur la quête de Mulder. Alors qu’il connaît les risques qu’il encourre - à terme une mort auto-infligée probable puisqu’il a déjà subi les pertes de mémoire -, il dit clairement a Scully qu’il ne veut pas perdre les moments de transe qu’il a parce qu’il veut se souvenir de l’enlèvement de sa soeur. Il va même jusqu’à demander directement au Dr Goldstein de lui administrer une seconde fois le traitement, ce qui aggrave son cas. Pour augmenter ses chance, il se rend à Quonochauntaug, là où se trouve la résidence secondaire de ses parents, là où s’est déroulée la dispute présente dans les flashbacks. Scully l’y rejoint plus tard à ses risques et périls pour tenter de le calmer car il est devenu psychotique. Pour y parvenir, elle essaie de le persuader que tout ceci n’est qu’artificiel et que les souvenirs qu’il a ne sont peut-être pas les siens, que ce moyen n’est pas le bon pour découvrir la vérité, pour exorciser ses démons (tiens, voilà l’explication du titre !).

Elle a sans doute raison, mais pourtant... Pour tous ceux qui depuis longtemps évoquaient la possibilité que l’Homme à la Cigarette soit le père de Mulder, cet épisode est du pain béni puisque Mulder se pose lui-même la question maintenant. En le voyant dans ses flashbacks (il n’est pas inintéressant de remarquer que Chris Owens avait déjà joué le rôle du grand méchant loup de la série dans l’épisode qui lui était consacré dans la saison 3, et qu’il jouera le rôle de Jeffrey Spender ensuite... qui n’est autre que le fils de l’Homme à la Cigarette), il soupçonne sa mère d’avoir eu une liaison avec lui et va la confronter en personne. Ca lui vaut une claque, mais la réaction de sa mère sur la défensive ne le convainc pas tellement qu’elle dise la vérité en niant les faits (en même temps, ça ne fait pas vraiment plaisir de voir son fils débarquer à l’improviste pour vous accuser d’une chose censée s’être produite il y a une vingtaine d’années).

C’est donc un épisode intéressant, puisqu’il montre un Mulder obsédé par cette nuit qui l’a profondément marqué et qui a scellé son existence. Sa quête de la vérité est avant tout personnelle, et il n’aura de repos tant qu’il n’aura pas trouvé une explication à l’enlèvement de sa soeur. Il est prêt à tout pour cela, à tel point de prendre des risques inconsidérés. C’est finalement la conclusion de Scully qui nous gratifie d’un bon vieux rapport dont c’est le chant du cygne (nul doute que Goodwin a voulu marquer leur fin en rappelant qu’ils existaient, dans un épisode qui revient sur le fondement même de la série, 4 saisons plus tard). Elle ne peut que constater qu’à force de chercher d’où il vient et pourquoi il en est là, il risque de se perdre en cours de route. Comme ça a failli être le cas. Tout ce qu’elle peut faire, c’est le soutenir, car elle est sans doute arrivée trop tard dans sa vie pour pouvoir le sauver.


Je n’ai pas parlé des flashbacks : ils sont très désorientants.