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Six Feet Under

5.03 - Hold my hand

Passé présent

vendredi 1er juillet 2005, par Feyrtys

Jeremy Podeswa à la réalisation et Nancy Oliver à l’écriture, ça donne un épisode formidable, habillé de plans magnifiques et de dialogues poignants. Le tout ponctué de clins d’oeil à la première saison…

Ce n’est pas si souvent qu’une série revient sur des événements qui se sont déroulés 5 ans auparavant. L’histoire des personnages évolue généralement entre le début et la fin d’une saison, presque de façon hermétique. On oublie que Ruth a eu un amant quand elle était mariée ; on oublie que Nate a fui la maison pour vivre en europe ; on oublie que David a renoncé à ses désirs de carrière pour devenir entrepreneur de pompes funèbres ; on oublie que Claire a été lycéenne, qu’elle est la petite dernière de la famille et la moins comprise. Pourtant, tout cela fait partie de la vie des Fisher depuis que nous les connaissons. Et le personnage principal de cet épisode est bien le passé. Quelle est l’influence du passé sur nos vies présentes ?

La morte de l’épisode n’a aucun rapport avec la famille Fisher. Aucun d’eux n’a organisé son enterrement, ni de près ni de loin. Ses cendres ne sont pas gardées dans une boîte en carton non plus. Pourtant la morte de l’épisode a une influence sur la vie des Fisher, et surtout sur celle de Ruth. Cette femme, c’est la mère de George, dépressive et visiblement abusive. George a environ 10 ans. Sa mère lui prépare un petit-déjeuner plutôt suspect, et la nervosité de l’enfant est palpable. La mère ne se comporte pas normalement. Elle veut que son fils reste à la maison aujourd’hui, qu’il n’aille pas à l’école. Elle le veut près d’elle, parce qu’elle a décidé de mourir et que malgré tout, elle ne veut pas mourir seule. Charmante attention. Elle insiste : « Hold my hand ». Elle lui a bien sûr interdit d’appeler les secours, comme la dernière fois… George s’exécute et assiste à la mort de sa mère en direct.

Voilà 50 ans que George a du vivre tous les jours avec ce souvenir. Voilà pourquoi cette silhouette lui apparaissait alors qu’il délirait dans l’abri anti-atomique de la maison Fisher. Cette silhouette était celle de sa mère, trop aimante, mal aimante, destructrice dans sa dépression et son suicide. Les Fisher eux aussi voient des morts. Mais ces fantômes ne sont jamais aussi inquiétants ni aussi agressifs que la mère de George, qui donne froid dans le dos même sans prononcer un mot. Est-ce la différence entre la raison et l’insanité dans Six Feet Under ? Est-ce parce que George n’a jamais pu se libérer de sa culpabilité qu’il ne peut affronter le fantôme de sa mère ?

Il avait l’habitude, enfant, de cacher de la nourriture dans ses poches. Peut-être parce qu’il n’aimait pas ce que cuisinait sa mère, peut-être gardait-il de la nourriture pour le cas où sa mère soit trop saoule et trop droguée pour lui faire à manger. Lorsque Ruth découvre de la nourriture moisie dans les poches de George, elle y voit une autre preuve de la folie de son mari. George y voit des symptômes aggravés de sa maladie et demande de nouvelles séances d’électrochocs à sa fille… Il est définitivement loin, l’insupportable George de l’année dernière. Dans la scène où Ruth lui demande pourquoi il a bien pu mettre de la nourriture dans ses poches, George est aussi impuissant qu’un enfant. On sent qu’il ne veut pas blesser Ruth, mais se faire aimer d’elle à tout prix. C’est une très belle scène.

Le passé revient hanter David et Keith dans leur parcours pour adopter un enfant. Surtout celui de David… Il y a 5 ans, David était un homme à la sexualité mal assumée. Il venait de rompre avec Keith pour ne pas avoir fait son coming-out auprès de sa famille. Il avait profité d’un voyage à Las Vegas avec Nate et Brenda pour se payer les services d’un prostitué, et c’était fait arrêter en flagrant délit sur un parking glauque… Keith l’avait sorti de là, et à partir de ce moment noir David avait commencé à s’accepter en tant qu’homosexuel. Cette histoire aurait pu rester dans le passé et les événements embarrassants que nous voulons tous oublier un jour. Mais voilà, personne n’échappe vraiment à ses erreurs, et l’assistante sociale qui s’occupe du dossier de Keith et de David accuse ce dernier de lui avoir caché une aussi grosse « tâche ». David est furieux. Il s’en veut tellement qu’il passe ses nerfs sur Keith et lui met tout sur le dos. Puis s’excuse. Avoir un enfant est une telle épreuve ! Finalement David et Keith examinent l’option « insémination artificielle et mère porteuse » et rencontrent une charmante, mais quelque peu « allumée » jeune femme dont le but dans la vie est visiblement de porter le plus d’enfants possibles afin de rendre les gens heureux autour d’elle…

Le passé vient à son tour ennuyer la jeune Claire qui a abandonné ses études artistiques pour se lancer dans l’art avec énormément de vanité et de narcissisme. Depuis que Billy a arrêté ses médicaments, elle le trouve plus vivant oui, plus « carpe diem ». Et envisage même de partir avec lui en Europe. Lorsqu’elle veut s’acheter un appareil photo dernier cri en prévision de ce voyage, sa carte est refusée. Elle appelle donc le notaire qui s’est occupé du testament de son père. Et c’est là que l’on se souvient que l’héritage de Claire ne lui revient qu’à condition de la poursuite de ses études. C’était dans le deuxième épisode de la série et Claire était déjà en colère contre cet impératif. Elle ne savait pas encore que les études ne seraient pas pour elle… Elle aurait pu bénéficier de cet héritage encore longtemps si sa mère n’avait pas prévenu le notaire que Claire avait arrêté ses études. Furieuse, Claire compte bien confronter sa mère à cette intervention qu’elle considère inacceptable. Et je la comprends. Ruth aurait pu en parler avec elle, si seulement elles réussissaient à se parler. Mais elles ne savent que se faire des reproches… Ruth apprécie le travail artistique de sa fille, ça ne fait aucun doute dans mon esprit. Elle en est même très fière. Ce qu’elle ne peut pas accepter, c’est que sa fille fasse les mêmes erreurs qu’elle… Ne pas aller à l’université, partager sa vie trop tôt avec un homme au passé inquiétant, c’est pourtant ce que Claire fait. Le manque flagrant de communication entre Ruth et Claire les amène à une scène très violente pendant laquelle Ruth, à court d’arguments, tentera de gifler une nouvelle fois sa fille (après le mariage), qui la menacera de répliquer cette fois-ci… Ruth peut à peine regarder Claire, et Claire est complètement aveuglée par le ressentiment qu’elle éprouve envers sa mère de ne pas supporter ses choix… La scène est très intense et laisse un amer goût de gâchis… Voilà comment des familles finissent par ne plus se parler. Des malentendus, des paroles dites dans la colère, des mauvaises décisions au mauvais moment. Ruth et Claire sont véritablement en danger. Ruth, parce qu’elle n’est d’aucune aide à George, cherche à contrôler Claire, et Claire n’a aucune idée de ce par quoi passe sa mère.

Dans le cas de Nate, son passé l’aide à se lier d’amitié (ou plus encore) avec la fille de George, Maggie. J’aime énormément le personnage de Maggie, interprété avec énormément de finesse par Tina Holmes. De Maggie émanent à la fois mélancolie et amour. Lorsqu’elle raconte à Nate comment elle a perdu son enfant en bas âge, elle est tout simplement sublime de retenue, alors que l’on sent qu’elle voudrait hurler. La douleur rapproche Nate et Maggie. Et pendant ce temps, Brenda s’éloigne un peu plus… A son travail, elle se lie d’amitié avec sa collègue, qui l’invite chez elle à partager un repas familial après une difficile journée. Les enfants de Jackie, son mari, sont aimants, épanouis, drôles et heureux. Pas besoin de flash-back pour savoir que Brenda n’a pas eu la chance de grandir avec ce genre de famille presque parfaite. Non, son truc à elle, ce sont plutôt les familles dysfonctionnelles. Elle se demande alors si elle aura jamais la chance de construire la même chose que Jackie. Ce à quoi je lui répondrai volontiers : « Brenda, ma chérie, toutes les familles ont leurs problèmes, surtout quand il y a une apparence de bonheur aussi évidente ! ». Pourquoi vouloir être parfait alors que c’est la meilleure façon de tout foutre en l’air ? Faire du mieux que l’on peut avec ce que l’on a, voilà quelle devrait être la devise de Brenda. Parce qu’avec un frère psychotique, une mère abusive, un mari avec de « lourds bagages » dirons-nous, une fille qui n’est pas la sienne, une fausse-couche et une belle-mère qui vous déteste, on ne peut pas dire que les choses sont bien parties pour recréer la famille Ingalls. Réveille-toi Brenda !

Le passé revient pour Rico sous la forme d’une paire de jambes divines… Lors d’une convention de propriétaires de pompes funèbres, Rico remarque une femme (la seule apparemment) et fait connaissance avec elle : il s’agit d’Angela, qui pendant la première saison avait remplacé Rico au moment où il était parti de chez les Fisher pour aller travailler chez Kroehner. J’étais ravie de revoir Angela, ses grands yeux écarquillés, sa façon de parler comme si elle avait 2 de QI, son humour qui ne me fait pas rire… Vraiment, ravie, je vous dis ! Rico et elle finissent dans une chambre d’hôtel et font l’amour avec beaucoup de légèreté. Ce n’est que pour un soir, il n’y a pas de lendemain. Pas de promesse. La scène dans laquelle ils se retrouvent devant le distributeur de junk-food est magnifique, parce que l’on sait qu’ils s’apprêtent à passer une nuit de sexe sans artifice et dans une simplicité naïve. Bien sûr qu’ils pourraient s’aimer, commencer une relation, mais aucun des deux n’est prêt, et aucun des deux ne veut se compliquer la vie pour le moment. Ils se contentent donc d’avoir du bon temps. Et gardent leurs espoirs pour eux.