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Battlestar Galactica
2.13 - Epiphanies
Laura for President
samedi 28 janvier 2006, par
Il est rare que les mourants ressemblent à des mourants dans une série télé. Il ne suffit pas de mettre un bidule dans les narines pour respirer ou une perfusion au bras pour passer pour malade, et pourtant, c’est souvent comme ça qu’on nous montre un mourant. Je n’ai d’ailleurs jamais vraiment trouvé aucun acteur très crédible en malade condamné, certainement parce que la maigreur est difficile à rendre visible et la faiblesse physique est difficile à jouer sans exagération. C’est pourquoi la performance de Mary MacDonnell m’a vraiment impressionnée. Dès les premières minutes de l’épisode, dès que l’on aperçoit Laura Roslin sur son lit d’hôpital, on ressent à quel point chaque inspiration est douloureuse et à quel point elle est fragile. Cet épisode est véritablement un Mary MacDonnell show.
Bien sûr, dans les deux derniers épisodes, déjà, on sentait que ses forces la quittaient, que la souffrance prenait le pas. On osait à peine imaginer la flotte des survivants sans elle, on osait tout juste imaginer le show sans elle et sans aucun doute, on ne voulait pas imaginer Baltar Président des Colonies.
Et avec cet épisode, on a presque été obligé de lui dire adieu, à Laura. Presque. Et autant vous dire que je suis contente d’insister sur ce presque, moi qui ne me suis toujours pas remise de la mort du docteur Greene et de la dernière saison de Six Feet Under.
L’épisode est presque entièrement consacré au personnage de Laura Roslin, laquelle, dans ses dernières heures, revit en flashback le dernier jour qu’elle a passé sur Caprica, le jour de l’attaque des cylons et le jour où elle a appris qu’elle avait un cancer du sein au stade terminal.
Flashback. Le mot le plus dangereux et le plus tentant pour un scénariste travaillant pour une série. Prenez de mauvais scénaristes qui n’ont absolument aucune idée de ce qu’ils veulent raconter et vous obtenez Lost. Prenez Rob Thomas et vous obtenez une saison 1 de Veronica Mars exceptionnelle. Mais arrêtons là les comparaisons, car il est inutile de rappeler pourquoi Ronald Moore et son équipe sont si bons. Les flashbacks de Laura sont liés à sa maladie et il est donc difficile de savoir s’ils sont vrais ou pas. Ce qui est certain, c’est qu’elle se remémore une époque plus heureuse, avant le génocide, avant qu’elle ne soit la Présidente des Colonies, et avant qu’elle ne soit sur le point de mourir bien entendu.
J’avais toujours vu Roslin comme l’archétype même de la politicienne un peu là par hasard, celle qui par son intelligence et de bonnes relations atteint un poste de secrétaire à l’éducation sans vraiment le vouloir, mais qui joue le jeu par conscience professionnelle. Et c’est justement parce qu’elle ne recherche pas le pouvoir qu’elle est une Présidente aussi intéressante. Parce que rien ne l’a conduit à ce poste que le pur hasard. Et pourtant, sa dévotion évidente pour les civils, pour le gouvernement, et même pour l’ancien Président, l’a obligé à accepter pleinement ce rôle et à en assumer l’entière responsabilité.
Il est intéressant de constater à quel point la Laura du début de son « mandat » est différente de la Laura « au bord de la mort ». Elle propose d’abord à Adama d’assassiner Cain, et maintenant, elle veut à tout prix faire disparaître le bébé de Sharon. Deux décisions qu’elle n’aurait jamais prise en première saison. Deux décisions qu’elle aurait combattu si le Président Adar les avait prises. Mais Laura est devenue de plus en plus dure et intransigeante, prête à tout pour s’assurer qu’après sa mort, tous ses efforts et tout ce en quoi elle croit ne tombent pas en ruine. La secrétaire à l’éducation est devenue la Présidente des Colonies, sans aucun doute.
Et en plus, elle était taillée pour, comme le prouvent les flashbacks de cet épisode. Laura Roslin n’est pas la « non-politicienne » que je croyais. En quelques images, quelques phrases, les scénaristes réussissent l’exploit de rendre le personnage de Laura encore plus profond et plus riche. On apprend, d’une part, qu’elle avait une liaison avec le Président Adar et d’autre part qu’elle n’était pas dans la politique par hasard mais par conviction et même par goût. Son bras de fer avec le Président à propos de la ligue des professeurs qui manifestaient violemment à Caprica est l’exemple de ce dont elle était capable, alors même qu’elle était engagée émotionnellement avec Adar. Et lorsqu’elle se rend compte qu’il lui a menti et qu’il s’est joué d’elle, elle ne baisse pas les bras mais continue à se battre avec un peu plus de fermeté et de détermination : Laura Roslin est un personnage exceptionnel, servi par une actrice non moins exceptionnelle.
Les flashbacks ne sont pas seulement intéressants pour ce qu’ils apportent au personnage, mais également parce que Roslin y voit Baltar et Six s’embrasser fougueusement... Et tous les doutes qu’elle avait jusque alors à propos de Gaius prennent tout leur poids. Non, elle ne peut définitivement pas faire confiance à son vice-président, mais comment alors se persuader que ce qu’elle a vu en rêve, alors qu’elle divaguait, est vrai ? Il parait encore plus difficile de convaincre une autre personne, disons, Adama ? Que va faire Laura avec cette information ? Que va-t-elle faire avec Baltar ?
Ah oui, parce que, j’avais oublié de vous dire, Laura est sauvée dans cet épisode. D’où l’emploi du futur dans mes questions ci-dessus. Ils ont sauvé Laura !! Je ne pouvais pas être plus heureuse. Rien que d’imaginer le pauvre Adama verser des larmes au-dessus du cercueil de Laura me rendait triste, alors quand Baltar arrive avec une théorie sur le sang du bébé de Sharon et son étrange particularité de faire disparaître des cellules cancéreuses, je n’ai pas pu m’empêcher d’être soulagée par cette nouvelle. Alors oui, cette découverte est plus que discutable, et ses conséquences se feront certainement connaître, mais en attendant, Roslin est vivante et elle va pouvoir continuer de diriger les derniers survivants des colonies.
Bien entendu, ce retournement de situation n’est pas anodin. Premièrement, je ne suis pas sûre que Laura apprécie grandement de se retrouver avec des cellules du bébé mi-humain mi-cylon de Sharon au milieu de ses bonnes vieilles cellules avec juste le nombre qu’il faut de chromosomes. Le fait d’être vivante plutôt que morte ne l’empêchera peut-être pas de critiquer les méthodes utilisées pour la garder vivante... Deuxièmement, et la prophétie alors ?? Le leader mourant qui est censé retrouver la Terre ? On en fait quoi ? Et puis d’ailleurs, ils en sont où de cette recherche de la Terre ? Troisièmement, rien ne peut prédire les conséquences de cette transfusion. Le cancer est-il parti pour de bon ? Est-ce une rémission temporaire ? Quelles seront les conséquences physiques et psychologiques de cet acte de la dernière chance ?
Bref, de nombreuses questions restent en suspens, mais une chose est sûre : rien ne sert d’établir des théories sur ce qui va suivre, car de toutes façons, on aurait tort. Ronald Moore is smater than us, n’oubliez pas !
Mais revenons à la décision pré « je sais que je vais mourir » de Laura à propos du bébé de Sharon. Pourquoi soudainement (c’est vrai quoi, ça fait longtemps qu’on sait que Helo va être papa) décider de se débarrasser de lui ? En quoi représente-t-il une menace pour le Galactica ? Pour l’humanité ? Roslin ne donne aucune explication claire... Et Adama se charge d’annoncer à la nouvelle à Helo, qui ne comprend pas mais qui obéit malgré tout et qui insiste pour être celui qui dira à Sharon que son bébé, leur bébé, devra être avorté par ordre de la Présidente.
Il s’en suit une scène qui met extrêmement mal à l’aise... Sharon, derrière sa cage de verre, rentre dans une rage irrationnelle et se blesse en heurtant sa tête à plusieurs reprises sur le mur de sa prison. Sa réaction est presque animale, dérangeante pour celui qui regarde. Qui est-elle pour agir de la sorte ? Une mère comme les autres qui perd la tête en imaginant qu’on va tuer son enfant et qu’elle ne peut rien y faire ? Ou bien une cylon qui ne sait pas - qui n’a pas été programmée pour savoir- comment réagir à une telle annonce ?
Heureusement pour lui, le fœtus de Sharon-Helo a quand même la bonne idée de servir à quelque chose, à savoir guérir les cancers ! Sharon a donc le droit de garder son bébé... Jusque là...
Laura est guérie, le bébé cymain ou humon, à vous de choisir, est sauf, et Baltar s’est de lui-même éloigné de la présidence, ce qui n’est pas seulement ironique mais aussi bizarre que le personnage.
Mais Gaius n’est pas à une contradiction près. Une lettre l’attendait, une lettre rédigée par Laura en vue de sa mort et de la prise de pouvoir par le scientifique. Il rentre en possession de la lettre seulement après avoir sauvé Laura, et il se rend compte alors que cette dernière ne lui fait pas confiance et remet en cause ses capacités de jugement. La lettre le rend furieux, et, attisé par une Six avide de le voir se rebeller contre Roslin, il commet sa plus grosse erreur depuis le génocide : il fournit au « mouvement pour la paix », dirigé par Gina (en vie et cachée sur le vaisseau Cloud Nine), une tête nucléaire... La tête nucléaire que Six lui réclamait dans la saison 1. Celle qui doit servir le plan des cylons dont nous ignorons absolument tout...
Le mouvement pour la paix est une drôle d’introduction dans le monde de Battlestar Galactica. Moi, on me parle de mouvement pour la paix, je pense pacifiste, je pense love and peace, je vois Gandhi et je dis « no to the war ! ». Et bien là, pour une fois, nous avons un mouvement pour la paix qui sabote, un mouvement pour la paix extrémiste et très peu aimable. Son dirigeant officiel ressemble à un gentil gars qui ne ferait pas de mal à une mouche et pourtant, son discours ressemble de très prêt à celui d’un Pétain après la débâcle de 1940, un truc qui sent un peu mauvais de pieds quoi.
C’est pour ça que Battlestar Galactica est une série géniale !! Parce qu’elle nous prend souvent à contre-pied. Et non, ce n’est parce que le gouvernement paraît juste et démocratique que tout le monde doit penser pareil et que des groupuscules ne doivent pas naître. C’est parfaitement logique que dans n’importe quel gouvernement, des mouvements d’opinion différente voient le jour ! C’est le pilier de la démocratie même. Alors oui, ce mouvement là est dangereux, il s’exprime mal et emploie des méthodes condamnables, mais ça ne veut pas dire que des questions ne doivent pas se poser !
Pourtant, Adama ne l’entend pas de cette oreille. Le nouvel Amiral du Galactica et du Pegasus se charge personnellement de convaincre le chef de ce mouvement d’arrêter ses conneries, si je puis me permettre, sous peine de bottage de fesses intersidéral. Très convaincant, le Bill, quand il veut. Mais un peu limite dans ce qu’il convient de faire à un prisonnier... Mais vu que Roslin n’est plus vraiment à ça près, je pense qu’il doit se sentir dans la parfaite légalité ! On verra si ce genre de comportements règle vraiment plus de problèmes qu’il n’en crée...
Gina est donc secrètement à la tête du mouvement pour la paix, même si je doute que son but soit une paix effective avec sa famille de cylons. Surtout quand on voit le petit sourire sur sa tête quand Gaius lui livre « da nuke »...
Un très bon épisode centré sur le personnage de Laura Roslin qui apporte son lot de questions et d’interrogations quant à la suite de la série. Que va-t-il advenir de la Présidente après cette transfusion miraculeuse ? Qu’est-ce que Gina va faire de cette tête nucléaire ? Quand est-ce que quelqu’un va se rendre compte que Gaius est bon à interner ?