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Battlestar Galactica
2.15 - Scar
No Future
vendredi 10 février 2006, par
Quelle est la vie des pilotes de vaisseaux de combat au jour le jour, quand leur mission consiste à protéger, au risque de leurs vies, la flotte civile ? Cette semaine, David Weddle et Bradley Thompson se sont attelés à la difficile tà¢che de répondre à cette question (déjà entrevue dans l’épisode 1.04 - Act of Contrition, écrit par les mêmes auteurs) et je dois avouer que pour une fois, je ne partage pas l’enthousiasme de Ronald D. Moore vis-à -vis de cet épisode.
Un épisode centré sur Kara "Starbuck" Thrace, ça ne pouvait que me plaire pourtant. J’ai une affection toute particulière pour ce personnage. Et pourtant, ses états d’âmes, développés dans cet épisode, ne m’ont pas touché, pire, ils m’ont laissé indifférente. Autant j’étais rentrée tout de suite, et sans condition, dans les méandres de la conscience de Lee, autant ceux de Kara m’ont paru étrangers. Je ne sais pas à quoi cela est du. Black Market se concentrait davantage sur l’homme de principes qu’est Lee, Scar se concentre sur la pilote et la capitaine qu’est Starbuck, la militaire qui doit aller au combat chaque jour, risquer sa vie et voir d’autres pilotes mourir. Ce sont deux approches psychologiques différentes mais qui néanmoins traitent du même sujet : que peut-il se passer dans la tête de quelqu’un qui peu à peu perd espoir ?
Pour Lee, il s’agissait d’une descente aux enfers, pour Kara, il s’agit d’une perte de ses repères et d’une confusion générale. Elle est paumée quoi.
Par quoi cela se traduit-il ? Starbuck se laisse aveugler par la compétition qui s’est installée entre elle et son ancienne élève, Kat. Elle en oublie ses devoirs et ses raisons de combattre qui l’avaient jusque là poussée à être la meilleure.
On l’avait presque oubliée, Kat, la rookie qui tenait grâce aux amphèts, celle qui avait peur de devenir pilote. On l’avait revue dans la confrontation fratricide de Resurrection Ship Part 1, très nerveuse, mais on avait plus ou moins compris qu’elle avait été promue lieutenant. Kat a bien grandi en somme. Comme tous les autres pilotes qui ont été les élèves de Starbuck la saison dernière. Ils ont tellement changé qu’on a du mal à les reconnaître d’ailleurs.
Starbuck a entrainé une deuxième Starbuck : Kat lui ressemble énormément, elle est aussi impétueuse et aussi arrogante que sa capitaine. Insubordonnée aussi... Elles ont en commun une même soif de combat, mais également une inquiétude sincère pour tous les pilotes qui risquent leurs vies et une profonde colère, mal dirigée, contre l’injustice de la mort de ces mêmes pilotes. Kat rejette sa colère sur Starbuck, qu’elle rend responsable de ce gâchis, et Starbuck rejette la colère sur... la bouteille. Et accessoirement sur le radar cylon, nommé Scar, qui prend en chasse tout le monde.
Si les pilotes tombent comme des mouches, c’est parce qu’ils doivent protéger un vaisseau de minage colonial, le Majahual, des attaques répétées de radars cylon. La flotte a besoin de ce minerai, et malgré les morts, il n’est pas question de partir avant d’avoir récupéré tout ce dont ils ont besoin. La survie du plus grand nombre est en jeu, et la vie de quelques pilotes ne rentre pas en compte dans l’équation... Tigh s’en indigne, mais Adama et Roslin ont pris leurs décisions.
Il n’y a rien d’autre à faire que d’accomplir sa mission, au péril de sa vie. Il n’y a rien d’autre à faire que de mettre aux enchères les objets personnels ayant appartenus aux pilotes décédés. Il n’y a rien d’autre à faire que de s’entraîner. Il n’y a rien d’autre à faire que d’oublier dans l’alcool que l’on peut y rester. Et Starbuck est très forte à ce jeu là. C’est même la meilleure.
Tellement bonne que Kat lui donnera le même discours que Kara avait servi à Tigh dans la saison 1 : les ivrognes n’ont pas leur place dans l’armée. Ils sont trop dangereux.
Le seul problème dans toute cette histoire, pourtant intéressante sur le papier, c’est qu’on a vraiment du mal à ressentir une quelconque inquiétude pour les pilotes qui risquent leurs vies. Ils restent des noms, des photos, et c’est tout. C’est peut-être faire preuve de très peu d’empathie, je ne sais pas, mais en tout cas ça n’a pas fonctionné pour moi, toute la peur et la colère de Kat et de Kara ne m’ont pas paru justifiées. Forcément, ça n’aide pas à apprécier l’épisode...
Reste tout de même quelques très bons points : les effets spéciaux d’abord. Ils sont exceptionnels dans cet épisode, encore plus innovants et plus recherchés que dans les épisodes précédents. Les scènes de combat dans l’espace, au milieu des débris, des astéroïdes, sont magnifiques et la luminosité rendue est très surprenante.
Ensuite, il y a le coupe Apollo-Starbuck qui finit par passer à l’acte, mais pour toutes les pires raisons du monde. Et qui s’arrête avant même d’avoir vraiment commencé. C’était très intéressant de mettre le couple shipper par excellence en danger de cette façon. Oui, on sait qu’il y a quelque chose entre les deux, on sait qu’il y a de l’amitié, de l’attirance aussi, de l’amour, peut-être oui... Ce n’est pas qu’on attend de les voir ensemble depuis le début, parce que la nature de leur relation est plutôt sous-entendue, mais quand même, les voir essayer de passer à l’action dans ces conditions désastreuses donne une nouvelle dimension à ce couple qui ne ressemble à aucun autre. Enfin, quand j’y réfléchis, y’a pas beaucoup de couple « commun » dans Battlestar Galactica... Adama et Laura, Tigh et sa femme, Billy et Dualla, Dualla et Lee, Lee et sa blonde, le Chief et Sharon, Helo et Sharon, Baltar et N°6, Baltar et Gina... Aucun de ces couples n’est traditionnel, c’est le moins que l’on puisse dire. Starbuck et Lee n’échappent pas à la règle, et leur rapprochement est une preuve supplémentaire de leur complexité.
Ce que j’ai aimé dans cette scène, c’est l’empressement de Kara en face d’un Lee qui est complètement dépassé par les événements et qui en plus, se sent légèrement utilisé pour des raisons qui n’ont rien à voir avec l’amour ou le désir.
Ce n’est pas la première fois que Kara choisit son partenaire d’orgasme pour de mauvaises raisons : n’oubliez pas que la Starbuck s’est retrouvée, on ne sait trop comment, dans les bras de Baltar ! Comme s’il y avait, d’un côté, la Kara amoureuse (le frère de Lee, le rebelle-rebelle sur Caprica) et la Kara qui veut satisfaire une envie passagère teintée de colère et de ressentiment comme elle irait vider quelques chargeurs à la salle de tir.
En même temps, dans la vraie vie, ça arrive de faire l’amour pour des tas de mauvaises raisons !! Et de se réveiller le lendemain matin en se demandant ce qui a bien pu nous passer par la tête... Rien de surprenant donc, à ce qu’un personnage comme Kara Thrace ait une sexualité compliquée, ou devrais-je dire, une sexualité comme tout le monde, et non pas un truc acidulé du genre « je ne fais l’amour que lorsque je suis totalement et inconditionnellement amoureuseuh ! ». Bon, il n’en reste pas moins que l’on devine que rien de sérieux ne se passe dans cette scène, et que vraiment, non vraiment, ils ne devraient pas passer à l’action dans des conditions pareilles. Et c’est Lee qui ramène Kara à la raison, parce que Lee, dans cette scène, ne veut pas être un objet sexuel... Il comprend rien ce pauvre Lee j’vous jure. Apollo, mon cœur, mon lapin, tu es un objet sexuel, que tu le veuilles ou non, voilà, remets-toi et passe à autre chose ! Et enlève-moi cette chemise là. Vooooooilà.
Bon, on l’a donc compris, Kara est paumée, Apollo est encore plus paumé, et comme Lili Taylor le dit si bien à Johnny Depp dans Arizona Dreams, « deux paumés ne font pas un trouvé ! ». La relation s’arrête donc là, mais sans pour autant être vraiment mise en danger. Ce qui lie ces deux là est bien trop fort pour disparaître avec cette erreur de jugement.
La scène de bataille finale, dans laquelle Starbuck et Scar joue à celui qui se dégonflera le premier, est particulièrement impressionnante d’effets spéciaux et d’intelligence du montage. Ca reste très clair, très visible, malgré tout ce qui s’y passe. George Lucas, tu peux venir prendre des cours auprès de l’équipe de BSG, ça te fera le plus grand bien.
Evidemment, Scar finit par se faire détruire, mais pas de la main de Starbuck, qui au dernier moment reprend ses esprits et donne l’occasion à Kat de mitrailler le radar cylon, ce qu’elle fait bien entendu. Un vrai travail d’équipe en somme.
Mais l’épisode ne se termine pas sur cette victoire. Il se termine sur la fête donnée en l’honneur de Kat, la nouvelle star de la flotte, qui détrône un moment la grande Starbuck. Et sur l’intervention de cette dernière, très rabat-joie, au milieu du champagne et des rires : elle se met à énoncer, un par un, tous les pilotes morts dans cette guerre-fuite-survie, jusqu’à ce que sa mémoire ne puisse plus se les rappeler...
Je n’y peux rien, cette scène ne m’a rien fait du tout. Elle aurait du, je sais, tout était en place pour faire hérisser les poils du corps, mais non, moi elle m’a rien fait. Pas de visage sur ces pilotes, pas d’émotion, pas de souvenir. Ca reste une liste, alors que ça devrait être bien plus que cela.
Il n’y a pas que cela qui m’ait empêché de rentrer dans l’épisode. Il y a eu aussi une surutilisation des souvenirs de Starbuck avec son rebelle-rebelle de Caprica, pour bien signaler que oui, d’accord, elle commence à renoncer à l’espoir de le revoir un jour, son chéri, et que oui, d’accord, elle en souffre. C’était poussif. Un tantinet trop poussif à mon goût. Sans oublier qu’encore une fois, on commence l’épisode avec un « X heures plus tôt », et que sincèrement, ça commence à m’énerver un petit peu ce procédé. Non pas qu’ils ne le maîtrisent pas, mais ça fait déjà plusieurs épisodes qu’ils construisent exactement de la même façon, et j’aimerais bien qu’ils passent à autre chose un peu. Il n’y a pas que le « X heures plus tôt » qui puisse créer du suspens et de l’attente.
Un épisode un peu plus faible que le précédent, qui touche moins et qui parait plus artificiel. Rien à redire des acteurs, tous exceptionnels, une très bonne note aux effets spéciaux, grandioses, mais un peu de regret sur les choix faits pour raconter cette histoire.