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Battlestar Galactica

2.18 - Downloaded

She’s alive !

vendredi 3 mars 2006, par Feyrtys

Si Ron D. Moore n’avait pas de podcast, je ne pourrais pas savoir qu’il fume. Détail essentiel, vous en conviendrez, qui me force à donner une petite leçon de morale à ce soi-disant auteur et producteur. Ron D. Moore, vous devriez avoir honte de corrompre ainsi la jeunesse américaine en exhalant votre fumée dans le micro de votre appareil-enregistreur ! Quel bel exemple !! Voilà à quoi mène l’adoration de la science-fiction et des comics, à la perte des valeurs fondamentales de notre grande nation. Honte sur vous, M. Moore. Honte sur vous.

Quoi de mieux qu’une introduction sans spoiler avec un peu de morale des années 50 ? Hein, je vous le demande ? Surtout lorsque l’on doit parler d’un épisode qui évoque, entre autres, le Bien et le Mal, l’amour, la morale et l’éthique.

C’est un épisode du point de vue des cylons, plus précisément de deux cylons très importants dans l’histoire des cylons. Il s’agit de N°6-Caprica, celle qui a séduit Baltar et permis la destruction totale des colonies en infiltrant la défense humaine, et de Sharon, la silent agent qui a tiré sur Adama. Toutes les deux sont des figures de la société cylon, reconnues, admirées, mais également torturées par leurs actes... Des cylons avec une conscience ? Ce n’est pas si nouveau que cela... Boomer, réalisant qu’elle est une silent agent, a elle aussi connu ces moments de doutes à bord du Galactica. Comment faire une différence entre ce que l’on a été programmé pour être et ce que l’on est ? Ouais, d’accord, c’est difficile à formuler, c’est très pas clair, mais je voudrais bien vous y voir vous ! Les toasters se posent des questions et se demandent qui ils sont, voilà, c’est mieux comme ça ?

Ca doit quand même être très étrange de vivre au milieu de visages identiques au votre. Je sais bien que certains dictateurs égocentriques et narcissiques ne rêvent que de ça, mais tout de même, la découverte de l’altérité est une phase essentielle de la construction de l’être humain. Etre tout le temps face aux mêmes visages, ça doit quand même porter sur le ciboulot à la fin. C’est intéressant de penser qu’également, malgré tous leurs efforts pour paraître humains, les cylons ne se reproduisent pas : ils se contentent de ne pas mourir, ce qui est fondamentalement le contraire. Ils n’oublient rien, toutes leurs pensées, expériences, ressentis sont transférés d’un corps à une autre. Je serai d’ailleurs curieuse de savoir si la « vie » d’un modèle N°6 est transférable vers un modèle N°8 (en l’occurrence, le modèle Sharon), et si cela provoquerait des changements de comportements... Car il y a bien des différences entre les modèles. N°6 semble très préoccupée par Dieu, beaucoup plus que N°8 ne l’est. Et le modèle N°8 est certainement le plus « humain » de tous les cylons que nous ayons vu jusque là.

Et lorsque, parmi ces modèles, des personnalités se démarquent, les choses se compliquent pour la société cylon toute entière.

Déjà, que « Caprica-Six » et « Sharon-j’ai tenté de tuer Adama » soient érigées au rang d’héroïne nationale m’a complètement surprise. Je ne m’attendais pas à voir chez les cylons de quelconques sentiments de gratitude, de respect et encore moins d’admiration. Ne sont-ils pas tous censés être exactement les mêmes ? J’ai trouvé très surprenant, également, de voir les anciens modèles replanter des arbres sur une planète qu’ils ont détruit il n’y a pas si longtemps que ça. Des cylons protecteurs de l’environnement ? Ce détail peut paraître complètement anecdotique, mais c’est le genre d’images que l’on retient de l’épisode tellement on trouve ça « bizarre » et déplacé... C’est une scène que Ronald D. Moore a voulu garder à tout prix, malgré les coûts de production. Et je comprends pourquoi : c’est exactement ce genre de détails a priori sans intérêt qui donne un air de réalisme à tout l’univers des cylons de Caprica. C’est ça, et le fait que les cylons se retrouvent dans des cafés pour socialiser. Donc, ils se socialisent ! Donc, ils veulent faire de leur ville une ville agréable, avec des arbres ! Ils veulent que ce soit joli ! Ils veulent vivre en société. Je me demande s’ils peuvent développer des relations amicales, voire des relations amoureuses... Après tout, qu’est-ce qui pourrait les empêcher de vouloir se trouver un compagnon, un amant, un ami ?

Et à côté de cette obsession de paraître humain (et meilleur que nous en même temps), ils veulent aussi trouver une solution au mal-être de Sharon-Number One, qui, depuis qu’elle a été ressuscitée, refuse de vivre parmi les siens. Elle se croit toujours humaine, parce que tous ses souvenirs ressemblent, à s’y méprendre, à des souvenirs humains. Photos, parents, vacances, appartement, elle a été programmée pour penser en être humain. Son « retour à la vie » se fait dans des circonstances terribles : elle a essayé de tuer Adama, a brisé le cœur de celui qu’elle aime et a trahi ceux qu’elle croyait être les siens. En plus, elle s’est faite assassinée. Normal que lorsque ses souvenirs sont téléchargés dans un autre de ses corps, sa première réaction est de hurler, un peu à la façon des nouveaux-nés, mais le désespoir en plus...

Sharon ne s’adapte pas à la vie cylon. Et N°6, celle de Caprica, celle qui a sauvé Gaius lors de l’attaque nucléaire, celle qui a permis l’accès aux défenses des colonies, ne s’adapte pas non plus à sa nouvelle vie sur Caprica, mais elle cache beaucoup mieux son jeu : c’est une manipulatrice.

La trouvaille la plus géniale de cette saison est sûrement d’avoir donné à Caprica-Six un Baltar, tout comme Baltar a hérité d’une Six après l’attaque. C’est simplement brillant. Les deux personnages souffrent des mêmes maux sans le savoir. Le plus fascinant étant que ni Chip-Six, ni Chip-Baltar (appelons-le comme ça aussi, même s’il parait improbable que les apparitions de Baltar s’expliquent par la présence d’une puce), ne ressemblent à la vraie Six ou au vrai Baltar. Le Chip-Baltar est froid, distant, moralisateur. On connaît le vrai et il n’est pas du tout comme ça. C’est comme si ses pires défauts, la couardise en premier, avaient disparu. De la même façon, Chip-Six est certes aussi manipulatrice que la vraie Six, mais il lui manque tout ce côté hésitant, questionnant, en mal d’amour, que nous retrouvons chez la Caprica-Six.

Elle est hantée par la présence de l’homme qu’elle croit avoir aimé... Et cette présence, tout comme celle de Chip Six pour Baltar, l’obligera à remettre en question ses devoirs envers les siens.

D’anna, la dernière cylon connue en date, celle qui s’est faite passer pour une journaliste à bord du Galactica, semble avoir une certaine position hiérarchique parmi les cylons. C’est elle qui accueille et réconforte les modèles auquel on vient de downloader des souvenirs. C’est elle qui demande à Caprica-Six de se rapprocher de Sharon-Number One pour savoir ce qui ne va pas chez elle.

Sharon-Number One pose beaucoup de problèmes à la société cylon. Elle est différente et ne s’adapte pas à leurs vies. Mais comme ils veulent être meilleurs que les humains, ils ne peuvent se résigner à se débarrasser d’elle. La seule chose qu’ils entrevoient comme solution est de garder ses souvenirs, ses données, ce qui fait qu’elle est celle qu’elle est, dans une boîte et de ne jamais plus les utiliser. En gros, ils la font disparaître ! Ca rigole pas chez les cylons.

Conclusion : si tu n’es pas un cylon parfait, tu ne mérites pas de vivre.

Caprica-Six aurait pu ramener Sharon-Number One à la raison et à la faire accepter la triste réalité. Elle était bien partie, jusqu’au moment où Sharon lui apprend que Baltar est vivant et qu’il est le vice-président des Colonies. D’Anna lui avait dit qu’il était mort, peut-être avait-elle deviné que l’amour allait tout compliquer pour Six... Car c’est bien de cela qu’il s’agit : l’amour comme donnée perturbatrice, comme variable inconnue et instable. Les cylons ne sont pas immunisés aux relations amoureuses. Pire, dans le cas de Caprica-Six, elle cherche à se faire aimer, à comprendre le sens des mots « je t’aime ».

Dire « je t’aime » et le penser, mesurer les implications de ces mots, voilà ce qui manque aux cylons pour se sentir humains. Et les deux modèles qui sont le plus proches de faire cette découverte, et qui l’ont peut-être déjà faite, finissent par remettre en question l’intégralité du « plan » cylon. Et par trahir les leurs en assassinant D’Anna et en sauvant un résistant humain, j’ai nommé Rebel Rebel, le petit copain de Starbuck, Anders.

Les implications sont gigantesques, les conséquences, inimaginables.

C’est drôle de penser que sur Caprica, Six œuvre pour sauver les hommes en trahissant les siens alors que sur Galactica, Gina, un autre modèle de Six, a œuvré pour obtenir une tête nucléaire en manipulant un homme prêt à trahir les siens... C’est une belle ironie.

Pendant ce temps, sur Galactica, Sharon-enceinte a quelques problèmes pour accoucher, et le Doc est obligé de pratiquer une césarienne... Dans une autre série, on aurait eu droit à tout un épisode sur cette naissance, sur ses complications, tant les enjeux sont immenses. Mais non, on est projeté dans l’action immédiatement, parce que la naissance est prématurée, parce que les cylons ne sont pas faits pour engendrer... La petite Hera (charmant prénom, celle de la pire mégère de l’Olympe) naît et la Présidente doit prendre une décision plus tôt que prévu. Elle ne peut se résoudre à l’infanticide, malgré tout. Et décide de donner le bébé mi-cylon, mi-humain, à une femme qui vient elle aussi de perdre son bébé, en lui cachant bien évidemment la véritable nature d’Hera. Elle convainc, ordonne plutôt au Doc de participer à ce mensonge, et le voilà qui annonce à Helo et à Sharon que leur bébé est mort prématuré... Sharon entre dans une furie sans nom, dont elle est seule capable, comme nous l’avons déjà vu, et le Doc manque de se faire tuer.

Dans une très belle scène, Helo et le Chief, silencieux, remettent les cendres du bébé à l’espace...

Comme l’a souligné Joma, on pense bien évidemment à Moïse dans cette histoire, et on imagine bien que malgré les précautions prises par Laura, des conséquences finiront fatalement par se faire connaître.


En avant pour les deux derniers épisodes de cette saison !