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1.01 - Wheel of Fortune
Jolie petite famille, mais celle d’un autre.
samedi 27 décembre 2003, par
Johnny Smith mène une vie idyllique. Professeur de biologie, fraîchement fiancé avec Sarah qu’il connait depuis son enfance, au petit soin auprès de sa veuve de mère. Sa vie est parfaite...jusqu’à un accident de voiture qui le laisse dans un profond coma.
Six ans plus tard, Johnny reprend conscience et découvre que la vie qu’il connaissait a disparu. Mais Johnny lui-même n’est plus la même personne qu’avant : il se retrouve en possession d’étonnants pouvoirs psychiques qui lui permettent de voir dans la vie passée, présentes ou futures de ceux qu’il touche.
Mode d’Emploi :
Cette critique ne concerne que la première partie du pilote que M6 a diffusée d’un seul tenant.
Cette critique ne s’attachera ni à comparer la qualité de ce premier épisode de THE DEAD ZONE par rapport au roman éponyme de Stephen King ou à son adaptation cinéma de Cronenberg et ni à en mesurer la fidélité. Par contre je soulignerai le travail d’adaptation accompli pour satisfaire les exigences du format série TV..
Puisque je vais parler d’une série où le héros possède le don de voir le passé, le présent et le futur, les critiques échapperont à toutes structures chronologiques. Chacune de mes critiques s’articulera autour de 3 thématiques d’ordre croissant d’importance d’après le conception voulue par Michael Piller, créateur et scénariste de la série.
Les parties en italique résument l’épisode
Les autres parties correspondent à mes commentaires.
I° Le bon samaritain Johnny
Si la série devrait éviter de tomber dans le schéma classique du héros au don unique aidant la police à résoudre des affaires criminelles, on peut toutefois s’attendre à voir le personnage mettre ses talents au service des autres. Ces bonnes actions sont plus un fil conducteur pour mettre en évidence les deux autres thèmes plus important que développe la série.
A peine sortie de son coma, notre miraculé prévient l’infirmière qui le soigne que la vie de sa fille est menacée par l’incendie de leur maison.. Entrée en douceur dans le monde de Johnny avec ce petit amuse-gueule.
La seconde bonne action de la semaine est plus chargée en émotion et, sans fioriture, réussit à toucher juste. Johnny informe le médecin vietnamien qui s’occupe de lui à l’hôpital que sa mère n’est pas mort après l’avoir confié, bébé, à un soldat américain. Le médecin assure que ce n’est pas possible : son oncle fut témoin de sa mort lors de la prise de Saïgon. Intrigué toutefois, il fait venir son oncle auprès du convalescent. Aux termes d’une nouvelle vision basée sur l’expérience de l’oncle, Johnny annonce qu’il a en fait vu mourir une autre personne. Ensuite, une scène sobre et très belle, aux dialogues superflus face à l’empathie de l’image, nous montre le médecin retrouvant sa mère au Vietnam.
En toute fin d’épisode, on retrouve la trame du tueur en série du roman. Johnny voit qui sera la prochaine victime du tueur qui sévit dans la région : Allison, l’infirmière qui lui a offert un gâteau pour son départ de l’hôpital. L’épisode finit sur un cliffhanger (charcuté par M6) où par grande pluie, la jeune femme court chez elle pour répondre au coup de téléphone de Bruce (l’ami de Johnny) l’avertissant du danger. La caméra fuit la scène pour montrer les bottes du tueur caché derrière un buisson du jardin de la jeune femme...
II° Johnny et ses visions.
La scène d’introduction, un peu faiblarde, nous montre « là où tout a commencé ». Johnny, enfant, percute la glace lors d’une activité sportive (le hockey) provoquant un léger traumatisme cérébral et sa première vision : celle d’un enfant prisonnier de la glace. A partir de ce moment Johnny fera preuve d’une intuition peu banale. La scène de la fête foraine, vingt ans plus tard, nous montre cela même si cette démonstration paraît superflue et cliché. J’ai pas trop pigé le but de cette scène.
Son accident de voiture et son coma de 6 ans transformeront ces intuitions en visions intenses. Ce qui était latent donne aujourd’hui sa pleine mesure.
Ce premier épisode prend grand soin d’établir l’étendue des capacités de Johnny.
Sa première vision post-traumatique nous montre qu’il peut voir des événements se déroulant dans le présent. Il peut aussi apprendre des faits relatifs à la vie de la personne qu’il touche (le nom de la fillette prisonnière des flammes)
Sa seconde vision (avec le médecin vietnamien) nous apprend qu’il est également capable de voir le passé et de le mettre en relation avec la situation présente.
Sa troisième vision, celle qui le touche de plus prés) montre sa capacité à voir la situation présente de quelqu’un.
Enfin, dans sa dernière vision, Johnny voit un événement futur. On note aussi que ses visions peuvent se déclencher au touché d’un objet inanimé.
Aménagement au format série : les visions de Johnny ne le tue pas à petit feu comme s’est pourtant le cas dans le roman. Difficile de faire une série sur plusieurs saisons avec un personnage mort au bout de 3 ou 4 épisodes. L’adaptation est donc parfaitement nécessaire. Mais, c’est peut-être un élément du roman qui sera développé sur le très long terme. (à dire vrai j’en doute puisque ça serait trop téléphoné)
Enfin difficile de parler des visions sans faire mention de leur remarquable réalisation scénique et technique.
Le parti pris de faire entrer Johnny dans ces visions et de lui donner une conscience réelle de son environnement est un choix fort intéressant et original.
De plus ce choix permet quelques très beaux tours de force techniques où la réalité et la vision se fondent dans une même scène ou quand Johnny peut se déplacer, au milieu de sa vision figée lorsqu’il désire se concentrer sur un détail précis grâce à la technique du « freezing time ». Remarquable !
III° Johnny et son entourage
Avant son accident grave, Johnny était un prof de biologie très passionné par son travail. le coup du cours sur la photosynthèse dans un arbre l’atteste et dépeint d’emblée un personnage généreux prêt à partager son savoir avec les autres. Très bon choix d’acteur pour incarner le héros. Visage mi-ange mi-démon au regard très intriguant. Il a de faux airs de Christopher Walken, l’interprète de Johnny dans le film.
A cette époque, il est engagé dans une relation amoureuse très sérieuse avec Sarah, prof de musique, et amie d’enfance. Elle fut d’ailleurs témoin de la première vision de Johnny, vingt ans plus tôt. Je ne cache pas mon plaisir de retrouver Nicole DeBoer dans le rôle de Sarah. Vous avez pu remarquer son très jolie minois (perso je fond dès qu’elle apparaît à l’écran) dans le film « Cube » mais surtout dans la dernière saison de « Star trek : DS9 »
« -Jolie petite famille.
Oui, celle d’un autre. »
Mais tout change après 6 ans de coma. Sarah est désormais mariée et maman d’un fils conçu avec Johnny quelques heures avant son grave accident de voiture.
On sent une Sarah coupable d’avoir refait sa vie. La mise en scène évite de tomber dans le mélo basique, d’abord sans mot lors de cette scène où, Sarah ne trouve pas le courage de rendre rendre visite à son ex-fiancé. Puis avec des mots quand...
Finalement, plus tard, elle trouve le courage de venir lui rendre visite à l’hôpital. Très subtile façon pour Sarah d’apprendre à Johnny l’existence de son fils (« Il s’appelle Johnny...il joue au hockey, bien sûr ») et belle direction d’acteur quand Johnny encaisse la nouvelle. Beau travail d’ « évitage de clichés ».
Que Sarah et Johnny étaient amis d’enfance avant d’être amant et donc sans doute d’être l’un pour l’autre son premier amour, n’est pas un détail anodin. Cet aspect de leur relation « d’avant » semble servir de ciment aux bases de ce que sera leur relation « d’après ». Peut-être même plus que la présence d’un fils dans le paysage.
Ce sont deux exemples d’adaptation du roman au format série où il n’est pas question d’isoler le personnage principal, de l’éloigner de Sarah. Adaptée ainsi, les possibilités de développement de la relation Johnny/Sarah sont intéressantes. Et il y a fort à parier qu’avec le mari, le shérif Walt (autre adaptation), cela donnera naissance au classique des classique : le triangle amoureux (ni voyez aucune connotation négative, revisiter les classiques peut se révéler très intéressant). Twist original en cette époque trouble : on se situe dans un monde d’adultes (d’ailleurs c’est un peu Everwood chez les adultes, cette affaire ;) ).
Quand Johnny rentre de son hospitalisation, après plusieurs semaines de rééducation, Sarah lui présente leur fils au cours d’une scène sobre où « Little Johnny » n’est pas mis au courant de l’identité de cet étrange monsieur au regard qui impressionne.
Autre personnage gravitant autour de Johnny « avant » et « après » : le Révérend Purdy. Un ami de sa veuve de mère (plus qu’un ami même) que notre héros ne semble pas particulièrement voir d’un bon œil, ni avant ni après le coma. Il le soupçonne de profiter de la fortune familiale. Homme d’Eglise et gigolo, c’est une combinaison intrigante ;).
Six ans après, la mère de Johnny est décédée et le révérend gère la fortune familiale (bien vu l’intuition Johnny !) Vu la tête qu’il tire quand le révérend apprend qu’il a repris connaissance, bien difficile de savoir s’il se réjouit de cette nouvelle ou s’il est contrarié dans ses plans de gérance de la fortune de sa défunte mère.
Autre changement par rapport au roman dont le but est certainement de créer un antagonisme avec le héros. A suivre, le potentiel semble intéressant.
Dernier personnage de l’entourage direct du miraculé : le bon pote de service, rééducateur personnel de Johnny et certains diront le black cliché de service. Sur ce point, je ne m’avancerais pas tout de suite. Je le trouve sympathique déjà et j’attend de voir comment il sera utilisé par la suite.En fait c’est surtout son doublage qui verse dans la caricature.
Une première partie très réussie qui permet de se familiariser avec les facultés paranormales de Johnny. Introduction des téléspectateurs et de Johnny à sa nouvelle vie, sa plus grande réussite est de bâtir les bases des personnages et de leurs relations, fort d’un très bon travail d’adaptation du roman de Stephen King aux exigences de long terme que doivent remplir une série.
Un nom banal, John Smith, vient de renvoyer un nom qui l’est tout autant, John Doe, à la place qui aurez toujours dû être la sienne : la morgue. Vous trouvez pas ça ironique de la part d’un gars qui revient à la vie ?
LTE || La Ligue des Téléspectateurs Extraordinaires