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Carnivàle

2.03 - Ingram, TX

Welcome home, Norman

jeudi 27 janvier 2005, par Feyrtys

Les choses avancent et se compliquent par la même occasion : c’est la magie de Carnivà le.

Sofie se réveille, en pleine nuit. Elle sent de la fumée à l’intérieur de sa caravane. Elle part réveiller Ben pour s’assurer que tout est normal. Mais Ben ne sent aucune fumée : il ne sent pas le danger. Pourtant il bien est présent…
Sofie cherche toujours sa place dans le cirque et profite de l’affection de Jonesy pour se faire embaucher sur la grande roue. Elle y travaille dur, mais son manque d’expérience et le fait qu’elle soit une fille (même si elle porte très bien le pantalon) déplaît à toute l’équipe. De son côté, Ben tente de lui faire relire les cartes (est-ce un ordre du Management ?) mais Sofie veut effacer ce lien avec sa mère à tout jamais. Elle veut même le brûler. Sa mère est morte, et le contrôle qu’elle exerçait sur sa fille part en fumée… Mais pas tant que cela. Sofie a beau vouloir brûler les cartes du jeu de tarot, elles finissent toujours par réapparaître (mais quelqu’un a très bien pu les placer en évidence ; je pense à Samson qui suivrait les ordres du Management). « What do you want ? » demande-t-elle à sa mère, qui peut-être ne peut plus lui répondre comme elle le faisait quand elle était encore vivante. Il est évident que la mère de Sofie tente de garder le contrôle sur sa fille. Etant donné qu’elle a essayé de la tuer, je ne pense pas qu’il s’agisse d’une protection particulière. Je pense au contraire que le seul moyen qu’Apolonnia ait en sa possession pour conserver le lien de domination qu’elle avait sur Sofie est bel et bien le jeu de cartes et ses énigmes. Nous ne savons pas encore exactement quel est le rôle de Sofie dans le combat que Justin, Ben, Scudder et le Management se livrent. Si elle est effectivement la fille d’un ancien avatar accompli dans sa forme de Usher (Scudder ou le Management ?), quels sont ses pouvoirs et à quoi sert-elle ? Pourquoi sa mère a-t-elle voulu mettre fin à sa vie ? Dans la dernière scène de l’épisode, Ruthie est guidée par la silhouette de Lodz (lui non plus n’a pas dit son dernier mot) vers la caravane où Sofie dort. Elle la couvre, éteint la lampe et ne se rend pas compte, en quittant l’endroit, que la radio allumée change impassiblement d’onde. Pour s’arrêter sur le discours de Justin, pour s’arrêter sur un prêche terrible qui parle de sacrifice :

In lush green pastures the shepherd lies down with his flock. But he does not sleep, forever vigilant against the beast. The sheep are nothing without the shepherd, but prey to the beasts of the night. When the sheep gives its life for the shepherd’s table, there is no greater honor. (merci à Lemonhead pour la retranscription)

A la fin du discours, Sofie ouvre les yeux et sort de son sommeil… Est-ce Apolonnia qui a tourné la radio ? Ou bien Justin cherche-t-il à atteindre Sofie d’une façon ou d’une autre ? Connaît-il son existence ? Sofie doit-elle être sacrifiée des mains du futur Usher, pour lui donner un plus grand pouvoir ?

En attendant d’avoir des réponses, nous ne pouvons que redouter le rapprochement qui s’opère doucement entre elle et Ben... Et ne perdons pas de vue qu’il y a de fortes chances que la damoiselle soit enceinte…

Ben continue de chercher the Crone, la vieille dame du poème de Kerrigan. Mais il a eu beau parcourir toutes les routes des environs, il n’a rien trouvé. Samson le presse. Le Management veut des résultats. Il reste à Ben une route, sur la colline, qu’il n’a pas complètement parcourue. Il s’y rend avec sa camionnette et trouve un vieillard voûté accompagné de sa jeune fille qui lui donne une direction. Et qui, accessoirement, lui propose de coucher avec sa fille, un peu attardée, qui ne dira rien à personne. Pour deux dollars. La scène est difficilement supportable. Le vieillard dans la misère la plus totale qui vend, sans vergogne, sa fille (qui ne doit pas avoir plus de 13 ans) un peu attardée, aux passants, en rajoutant : « She’s tight ». De quoi vomir. Et de quoi se mettre en rogne. Mais Ben réussit à se contrôler. Il menace physiquement le vieillard (qui ressemble étrangement à Stumpy, qui lui vend sa femme et exhibe sa fille), mais au lieu de se soumettre à ses instincts de meurtre (et on sait qu’il en a, des instincts de ce genre, le petiot), il laisse le vieillard repartir avec de l’argent et la promesse qu’il ne fera plus jamais ça. Et quand on voit la tête du vieillard en question, on se dit que Ben a du utiliser autre chose que ses talents d’orateur pour convaincre cet homme de retourner dans le « droit chemin »… Là où Justin pousse les coupables au suicide, Ben les aide à arrêter les frais de leur plein gré. C’est idée différente de la justice en quelque sorte… Et une autre foi dans l’humanité, peut-être…

Ben finit par trouver un camp dans la colline, bizarrement décoré de mannequins disloqués et de divers briques à braques… Il s’avance prudemment et découvre un papier décrivant et illustrant la technique des yeux artificiels…

Il faut noter l’insistance des yeux et de la vue, par extension, dans ce début de saison. La vierge Marie dépourvue d’œil que Ben aperçoit dans une vision alors qu’il se rend dans le couvent où se trouve Kerrigan… Ruthie qui voit l’invisible… Justin qui dessine, au milieu des vulves, des globes occulaires exorbités… Et enfin Ben qui lit une page étrange sur les yeux artificiels.
Si l’œil permet de voir, la cécité permet de voir au-delà. Au-delà des impératifs du temps et de l’espace, de l’emprunte de la réalité, l’aveugle, dans la mythologie, est celui qui voit.

Ben ne trouve pas la vieille dame qui est censée lui donner des indices supplémentaires, la Crone qui lui prédira l’avenir ou qui éclaircira son chemin, mais il trouve un groupe de consanguins qui le poursuit, le frappe, le dépouille et l’enterre vivant. Enfin presque. Car Ben est sauvé par son père, une fois de plus (souvenez-vous de Scudder l’empêchant de se suicider). L’insigne des Templiers, gravée des initiales H.S., que Ben avait gardé avec lui, lui permet de se faire passer pour Henry Scudder. Et de se faire sauver in extremis d’un enterrement précoce. Le groupe d’hommes (quelques peu atteints, il faut bien le dire) attendaient visiblement la venue de Scudder. Sans savoir, de toute évidence, quel âge il est censé avoir ou à quoi il ressemble…

Je suis contente de voir Ben agir et chercher des réponses, mais ce qui m’embête c’est qu’il obéisse aux ordres du Management. Il pourrait au moins distiller ses informations, cacher certaines choses pour essayer d’en apprendre d’autres… Il pourrait aussi dire Non, et se rebeller contre un personnage dont il ne sait rien. Sauf qu’il l’a manipulé pour qu’il tue Lodz…
Je pensais que Ben n’avait aucun remord de son acte. Ce n’est pas tout à fait vrai. Il évite Ruthie et est mal à l’aise en sa compagnie. Mais peut-être cela a-t-il à voir avec le fait qu’elle ait été morte et bien morte avant qu’il ne la ressuscite. Il semble quelque peu… dégoûté de sa présence, comme si elle est une aberration de la nature. Ou une preuve vivante qu’il est capable de ressusciter les morts et de tuer des vivants, qui sait. Mais j’ai beaucoup aimé la confrontation que Ruthie impose à Ben. "Don ’t you hide from me like you hide from everything else !" Mais Ben n’est pas si courageux que ça... "Some things die", lui dit-il. « Some things don’t », lui rétorque-t-elle… Ils pourraient parler de leur relation, du fait que Ruth continue à avoir des sentiments alors que lui n’en n’a plus. Ruthie ne sait pas ce que Ben a fait pour la ramener à la vie, et il ne sait pas encore qu’elle voit des morts et que Lodz semble vouloir lui parler ou l’amener à comprendre certaines choses. D’ailleurs, les choses ne s’arrangent pas pour elle : lors de son show, son serpent essaiera de l’étouffer. Ce n’est que grâce à son fils, Gabriel, qu’elle s’en sort… Apeurée, elle lui demandera de le tuer… Gabriel s’exécutera, dans une scène qui vous fait presque plaindre le pauvre serpent, et pourtant, j’ai une peur viscérale de ces bêtes là…
Bref, on pourrait presque dire que Ruthie « came back wrong », pour piquer une réplique de Buffy… Reste à savoir ce que Lodz va vouloir lui faire faire. En tout cas, j’aime énormément son personnage, c’est une femme qui, malgré son âge, est toujours attirante, toujours très sexuelle, et à la fois rassurante et profondément aimante. C’est pas tous les jours que l’on a des personnages féminins, passés la quarantaine (et même devrais-je dire la trentaine) qui ne cessent pas, comme par magie, d’avoir une sexualité, des sentiments et des désirs.

Des désirs, Justin continue à en avoir. Et autant dire que ça ne lui pose aucun problème… Bien au contraire. Justin devient peu à peu un être totalement dépourvu de la moindre morale et absolument décidé dans ses actes. Décidé, calculateur, il est l’opposé radical de Ben, qui se cherche encore, hésite, mais arrive à garder une certaine sensibilité, une certaine chaleur. Justin est devenu froid. En accueillant dans sa demeure le révérend Norman Balthus, Justin prouve même qu’il est capable de torturer le seul être humain qui n’a jamais montré que de la pure affection pour lui. L’homme qui les a recueilli sa sœur et lui alors qu’ils étaient enfants, et qui depuis son attaque cérébrale est paralysé, connaît la vraie nature de Justin. Il sait qu’il est le démon. Lorsque Justin, dans le dernier épisode de la saison 1, a voulu lui faire affronter son pire péché dans une vision, Norman n’y a vu que la nuit où il a sauvé ces deux enfants russes perdus et abandonnés. Son pire péché est donc bien d’avoir permis à Justin de grandir… C’est à ce moment que Justin a compris de quelle nature étaient ses visions. Et que sa destinée n’était pas de répandre la parole de Dieu, mais celle d’une autre instance, bien moins magnanime et bien moins aimante que celle du Nouveau Testament.

Justin se plaît à torturer son père adoptif. « Welcome home, Norman », lance-t-il avec ce sourire sadique en coin… Il lui raconte d’abord quelle admiration il a pour lui, tout en le nourrissant d’une bouillie de petit pois pour les bébés, et continue son discours en lui disant que grâce aux antennes radio qu’il va faire construire, il va pouvoir parler à plus d’âmes que le Seigneur lui-même… « It’s going to be breathtaking… ». Mais le pire restant à venir. Alors que Celeste nettoie la maison, et que Justin et Norman sont assis autour d’une table, Justin fait tomber son verre de lait pour pouvoir approcher Celeste d’un peu plus près et la voir se démener pour nettoyer à ses pieds… Il l’embrasse à pleine bouche et lui fait comprendre qu’il aurait bien envie d’une petite gâterie : "Your mother tought you how to pray, didn’t she ?". Voilà une bien curieuse façon de prier, effectivement… Les produits laitiers, ça donne vraiment des sensations pures… ou impures d’ailleurs. Tout cela devant les yeux horrifiés de Norman, incapable de faire quoi que ce soit.

Le Temple de Jéricho se construit peu à peu, et Justin insiste pour recueillir tous les gens qui ont besoin d’un dîner et d’une couche… « I need them all », dit-il au journaliste, Tommy Dolan. Même si ce sont des criminels. Sous-entendu : surtout si ce sont des criminels. Stroud a d’ailleurs compté les survivants de Babylon : il n’y en a qu’un est il s’appelle Henry Scudder… Sa route continue…
Le parallèle entre le Temple et le Cirque est intéressant par ailleurs : là où le cirque se monte et se démonte, ne reste jamais sur place très longtemps, le Temple se construit pour rester et marquer le monde. Le cirque ne fait que passer, il suit des étapes et chacune est comme une épreuve. Le Temple, lui, est construit pour ne jamais être défait, tout au contraire. Mais l’un comme l’autre, c’est qu’ils veulent atteindre qui fera la différence.

Du côté des « communs des mortels », les choses aussi se compliquent. Jonesy et Libby se cherchent et se trouvent, la tension sexuelle monte d’un cran entre eux lorsque Jonesy essuie les pieds mouillés de Libby… Dora Mae est souffrante, et pourtant son mari continue de la vendre à des clients. Le remède pour aller mieux : une sorte de boisson gazeuse, ressemblant au coca-cola, qu’elle s’injecte après avoir fait mousser directement dans le vagin… Charmant… Son adorable mari, par ailleurs, organise un goûter d’anniversaire à sa façon : le fils d’un magnat du coin lui a demandé de donner un petit spectacle pour son fils et ses amis, dont la moyenne d’âge ne doit pas dépasser 13 ans… Même si Dora Mae et Libby n’apprécient guère de devoir danser nue devant des gamins, ce n’est pas ça qui arrête Stumpy, la malhonnêteté incarnée. Il semble d’ailleurs qu’il ait quelques soucis d’argent, puisqu’un homme le menace…