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Carnivàle

2.01 - Los Moscos

Listen to your blood...

jeudi 13 janvier 2005, par Feyrtys

Rarement une série m’aura autant époustouflée. Rarement un premier épisode d’une seconde saison m’aura paru autant dans la continuité du dernier épisode de la saison précédente. Et moi qui pensait que Carnivà le possédait la réalisation et la photographie les plus abouties, je me trompais : ils ont fait encore mieux. C’est bien simple, j’ai passé tout l’épisode l’air béat, la bouche entreouverte et la mà¢choire ballante, ce qui je le reconnais n’est pas avantageux comme expression, mais que voulez-vous ? La magie a opéré encore une fois…
Je m’étais aussi préparée un petit verre de vin rouge, mais je n’y ai pas touché avant la fin : le moindre geste que j’aurais pu faire aurait gà¢ché ce moment extraordinaire qui consistait à se laisser emporter par l’histoire…

Tout est pure continuité : le discours d’ouverture de Samson, inintelligible à moins de savoir exactement de qui et surtout pour qui il parle, est une suite parfaite du monologue, tout aussi incompréhensible, qu’il a donné lors du premier épisode de la première saison. Il donne autant d’indices que d’énigmes ; il parle de l’Histoire mais nous ne savons pas de quel côté il se trouve, celui du Bien ou celui du Mal.

Le prêche de Justin est également la suite logique de son appel à la construction du Temple et de son annonce de l’Armageddon. « Ecoutez-moi lorsque je vous dis que les plus Grands des Commandements n’ont pas été écrits dans la pierre. Ils ont été écrits dans notre sang et notre chair… » Le prêche de Justin n’est plus un sermon. C’est une prophétie…

La caravane d’Apollonia est en feu. Seuls Jonesy et Sofie en sortent vivants. Dans une scène extrèmement puissante et émouvante, grâce en autre au fantastique jeu de Clea Duvall, Sofie hurle à sa mère, qui n’est pas encore morte mais est en train de succomber, « Just die !... just die… ». Les derniers battements de cœur d’Apollonia résonnent et Sofie s’effronde.

Dans la caravane du Management, Ben demande des explications (enfin ! il se réveille !). Pourquoi avoir rendu sa vue à Lodz ? Pourquoi l’avoir tué par ses mains ? Le Management se justifie : la vie de Lodz n’avait pas de valeur. Il lui fallait forcer la main de Ben, littéralement. Il fallait lui faire affronter sa vraie nature… C’est-à-dire ? Un homme qui a pouvoir de vie et de mort ? Un assassin ? Ben a un sursaut de volonté et de libre arbitre ; il se révolte. Il n’est pas une marionnette que l’on peut faire danser.

Mais le Management ne veut pas perdre Ben. Alors que ce dernier est sur le point d’échapper à cette influence funeste, un bras surgit, derrière les rideaux de taffetas rouge, et saisit la peau nue de Ben. Le voilà à présent au milieu du désert, le ciel est lumineux, comme jamais il ne l’a été durant toute la première saison. Le Management lui fait voir un avenir, un certain avenir. Celui du faux soleil explosant sur la Trinité. Celui de l’avènement de la raison contre la magie. La fin de leur Monde, mais la fin de l’Humanité également ?

Dans cette vision, Justin apparaît, dans la position du prédateur, les yeux noirs : « Ye, offspring of serpents : Who warned you to flee from the wrath to come ? », demande-t-il à Ben. Cette phrase, que l’on pourrait traduire par : « Engeance de vipères, qui vous a montré le moyen d’échapper à la colère qui vient ? » est issue de l’Evangile selon Saint Matthieu, texte très présent pendant tout cet épisode. Il serait bien difficile de trouver un sens à cette phrase, cependant, on peut constater que l’explosion a touché à la fois Justin et Ben. Et surtout, cette vision provient du Management. C’est lui qui la donne à Ben. Et peut-on vraiment faire confiance à un homme caché derrière des rideaux, un homme qui se cache et qui manipule les hommes autour de lui ?

D’autant que, d’après ce que nous apprenons sur son identité, tout laisse à penser qu’il est du côté de l’obscurité et du Mal. Il est le soldat russe mutilé par l’ours… Il se nomme Lucius Belyakhov, et de ce fait, est bel et bien le père de Justin et d’Iris. Ses paroles ne peuvent être prises pour la vérité. Il suit un but (mais lequel ?) et ne recule devant rien pour l’atteindre. De la même façon, nous ne savons rien des buts de Scudder, ni pourquoi il semble fuir le Management. Voilà ce que nous savons : le soldat russe est l’ennemi de Scudder, tout comme Justin est l’ennemi de Ben aujourd’hui. Le Management veut retrouver le père de Ben (pour le tuer ? pour s’allier avec lui contre Justin ? pour lui prendre ses pouvoirs ?) et ce dernier le fuit : voilà de quoi nous sommes sûrs. Tout le discours introductif de Samson, et toutes les paroles du Management pour convaincre Ben que son rôle est de servir ses desseins, tout ces discours sont fallacieux.

De son côté, Justin est en train de réaliser sa destinée. Il n’est plus déchiré par sa conscience, ni par son éthique de prêtre. A vrai dire, il n’a plus rien d’un prêtre. Il est devenu un prêcheur de sa propre parole (et de celle du Mal par extension) : il est devenu le prophète. Justin, contrairement à Ben, obéit à présent à ses rêves, à ses visions, et à ses pouvoirs. De ce fait, il semble plus puissant que son ennemi, et surtout, davantage prêt à l’affronter. Seulement Justin ne sait pas encore qui il doit affronter.

Dans une scène onirique de toute beauté, et je pèse mes mots, Justin se trouve près d’un arbre mort, en haut d’une colline. Du haut de cette colline, il aperçoit un Temple, entouré d’antennes radio. Le Temple ressemble d’ailleurs plus à une usine qu’à une Eglise, de par son architecture longiligne et dénuée d’ornement. L’homme à l’arbre tatoué lui fait face. Il s’entaille la paume de la main et en fait couler du sang bleu. Un sang inhumain.

Un peu plus tard dans l’épisode, Justin rencontre un homme étrange, une sorte d’archéologiste nommé Wilfred Talbot Smith, qui de toute évidence a connu Henry Scudder. Wilfred écorche la main de Justin pour vérifier s’il est, ou non, dans sa forme la plus accomplie : s’il saigne, c’est qu’il est encore humain et qu’il n’est pas encore le Usher. « Il faut le tuer de vos propres mains », lance l’archéologiste (ou adorateur d’un culte, ou fou dangereux, allez savoir). « Tuer qui ? » rugit Justin (et si je vous dis qu’il rugit, c’est qu’il rugit drôlement bien). « Scudder, Henry Scudder. You’ll be the Prophet, the Usher ». Justin doit donc tuer son nemesis pour posséder tous les pouvoirs et accéder à une forme supérieure d’humanité (ou d’inhumanité, ou de divinité…). Mais que signifie Usher ?

On pourrait traduire par « envoyé », du fait de ses racines communes au mot huissier. Mais on pourrait également traduire par « celui qui fait entrer », puisque le mot « usher » est également utiliser pour signifier « portier ». C’est également « celui qui conduit »... Ce qui est très proche du mot "Prophète". Et n’oublions pas que "Usher" est accompagné dans cette séquence par "Destruction"… On peut penser que si Justin tue son ennemi, il deviendra le Usher of Destruction. Mais si c’est Ben qui le tue, deviendra-t-il de son côté le Usher of « Hope » ?

Cet homme tatoué est une vraie énigme dans Carnivàle. Mais je commence à y voir un peu plus clair, et voici ma théorie à son sujet. Je ne crois pas qu’il soit réel, au même sens que Scudder et le Russe sont réels dans les rêves et les visions de Ben et Justin. Je pense que l’homme tatoué est une projection de l’accomplissement d’un des deux avatars, et probablement celui du Mal. En tuant leur nemesis, les avatars deviennent cet être « supérieur ». En l’occurrence, si Justin tue son ennemi (qui est Ben a priori) il deviendra le Usher, il deviendra l’être à l’arbre tatoué. Je ne parle pas nécessairement de transformation physique, il restera probablement le même, mais ses pouvoirs seront plein et entier. Alors pourquoi Sofie voit-elle l’homme tatoué en train de violer sa mère ? Là encore, je pense qu’il s’agit d’une incarnation d’un pouvoir, et non un être réel. Je pense qu’Apollonia a été violée l’un des deux avatars à un moment où ils n’étaient plus humains. Et peut-être que cet état n’a pas duré parce qu’un événement a empêché l’un ou l’autre de s’accomplir réellement. De ce fait, Sofie serait-elle aussi un avatar ? Pourquoi sa mère a-t-elle cherché à la contrôler pendant toute sa vie, et pourquoi a-t-elle eu si peur de sa fille qu’elle a préféré se suicider avec elle ?

Et qui nous dit que son puissant esprit télépathique est définitivement éteint ? Tout comme pour la résurrection de Ruthie, et le fait que Justin ait été affaiblit au moment où elle est revenue à la vie, il reste des questions sans réponse… Pourquoi Ruthie avoue-t-elle à Ben qu’elle « ne se sent pas elle-même ? ». Lodz aurait-il réussi à survivre à sa mort, d’une façon ou d’une autre ?

Le destin de Justin continue à se réaliser. Son père adoptif est sur le point de mourir, par sa faute. Sa sœur est plus diabolique et surtout plus malsaine que jamais : il n’a plus de lien avec l’humanité. Ses prophéties se répandent vite grâce à la radio que Tommy Dolan lui a mis à disposition. Il récolte énormément d’argent et pourra très bientôt construire son propre temple, en bas de la colline à l’arbre mort, celle-là même qu’il a vu dans ses rêves. Il n’est plus un homme de Dieu. Il reluque l’entrejambe de sa sœur comme s’il s’agissait du Saint Graal, et elle le laisse faire. Il résiste à franchir la porte de sa chambre et à la rejoindre dans son lit, mais pour combien de temps ? Il trouve refuge dans un bordel…

Le rôle d’Iris dans l’accomplissement de Justin se fait de plus en plus important. Elle a mis le feu à l’Eglise, et rappelez-vous que cet incendie avait signé le début de l’errance de Justin et son questionnement sur l’origine de ses pouvoirs. A la fin de son errance il avait accepté l’idée qu’il était le Démon. Ma question est donc la suivante : comment Iris savait-elle ce qu’elle devait faire ? Quel est son rôle ? A-t-elle des visions elle aussi ?

Le rôle de Samson est lui aussi très mystérieux. Le Management l’avait évincé pour lui préférer l’obéissance et la loyauté de Lodz, mais dans le but de le faire assassiner par Ben. Samson avait alors chercher à en savoir plus sur Ben et sur Scudder, mais sans résultat (apparent). Samson semble plus tenir à son cirque qu’aux buts du Management. Il continue pourtant de lui obéir. Même si pour cela il doit mentir à Lila, la compagne de Lodz, et à Sofie, à propos du corps de sa mère. En effet, le Management a décidé de faire passer les os de la « diseuse de bonne-aventure » (sous-estime-t-il les pouvoirs d’Apollonia ?) pour ceux de Hawkins, afin que la police abandonne leur recherche pour meurtre. Et Lodz sera jeté par Samson et Ben du haut d’un ravin… « Si quelqu’un doit choisir un numéro pour ça, ce sera moi ! » lance Samson, en référence aux lois du cirque. Samson ne semble pas ravi de devoir obéir, et pourtant il le fait. Lorsque le Management lui intime l’ordre de pas laisser Ben entrer dans sa caravane, parce qu’il le « tente » (dans quelle mesure ?), Samson devient le messager et les oreilles du Management. Et dit à Ben « d’écouter son sang »...

Et enfin, pour la première fois depuis le début de cette série, Ben agit ! Il retourne dans la congrégation des Templiers, celle qu’il avait visité avec Samson mais sans résultat. Il cherche des papiers, des réponses, des preuves que son père a bel et bien appartenu à cette congrégation, ou confrérie, ou que sais-je encore… Mais ses réponses il les obtiendra d’un homme, revenu par hasard sur les lieux. Un homme qui connaît Scudder et qui en a une peur bleue. Ben se fera suffisamment convaincant (quand il veut, il peut le petit !) pour soutirer des informations à cet homme. Scudder est venu ici même, il y a 12 ans, avec un autre homme (Wilfried ?) et ils ont pris des livres sacrés, des Apôtres (celui de Matthieu ?) avec eux. Scudder a fait la connaissance de Kerrigan, celui qui est à l’origine de la tenture où l’on aperçoit l’homme à l’arbre tatoué au milieu d’une plantation… Mais Kerrigan est devenu fou et il a perdu l’esprit… L’homme est visiblement effrayé par Scudder, et supplie Ben de ne rien lui avouer à son propose, sinon il le tuera… « Il n’est pas humain ! » sanglote l’homme à terre. « Moi non plus » répond Ben. Aaaaaaaaaaah ça fait plaisir de l’entendre parler comme ça, le petit Hawkins ! Ca change des laconiques : « It ain’t your god damn business »…

Pendant ce temps, Justin réussit à atteindre l’esprit d’un prisonnier en distillant quelques phrases énigmatiques par les ondes radios... Le prisonnier s’appelle Stroud et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il n’a pas l’air patibulaire, mais presque… « My archangel », voilà comment Justin le nomme… Ca donne froid dans le dos…

Une autre scène qui donne des frissons, c’est celle où Justin, devant son miroir, s’arrache sa propre peau, façon « V », mais en mieux, je vous rassure… Et sous sa peau, il découvre le visage de Ben, et il s’interroge : « Who are you ? ». Et oui, car Justin ne sait rien de Ben, et il ne sait rien de son père. A ce niveau là, il est en retard sur Hawkins, qui lui en sait davantage. Et Scudder tente de rester en contact avec lui, par ses rêves. Le Management lui, ne semble pas avoir conservé de lien avec son fils… Peut-être en a-t-il gardé avec Iris… Justin a été mené sur une fausse voie par l’archéologiste. Il croit qu’il doit tuer Scudder. Alors que selon toute vraisemblance, c’est Ben qu’il doit tuer. Qui retrouvera Scudder en premier ?

Et pour finir, rien que pour vous, voici une retranscription des deux monologues de Samson... Amusez-vous à les décrypter et faîtes-nous part de vos théories sur le forum d’EDUSA consacré à la série !

" Before the beginning, after the great war between heaven and hell, God created the Earth and gave dominion over it to the crafty ape he called man. And to each generation was born a creature of light and a creature of darkness. And great armies clashed by night in the ancient war between good and evil. There was magic then. Nobility. And unimaginable cruelty. So it was. Until the day that a false sun exploded over Trinity and man forever traded away wonder for reason."

"On the heels of the skirmish man foolishly called The War to End All Wars, the dark one sought to elude his destiny, and live as a mortal. So he fled across the ocean to the empire called America. But by his mere presence, a cancer corrupted the spirit of the land. People were rendered mute by fools who spoke many words but said nothing... for whom oppression and cowardice were virtues... and freedom, an obscenity.

And into this dark heartland, a prophet stalked his enemy. Until, dimished by his wounds, he turned to the next in the ancient line of light. And so it was that the fate of mankind came to rest on the trembling shoulders of the most reluctant of saviors...."